Sur le bassin versant de la Drôme, l’eau est, comme ailleurs, une ressource précieuse et vulnérable. Elle alimente nos usages quotidiens, permet l’irrigation des cultures, soutient les écosystèmes et façonne nos paysages. Mais les effets du changement climatique combiné à la hausse des besoins en eau en fait une ressource vulnérable. Dans ce contexte, la question du partage de l’eau devient encore plus centrale.
Le nouveau schéma d’aménagement et de gestion des eaux de la Drôme (SAGE Drôme) propose des solutions concrètes pour préserver l’eau durablement et organiser au mieux le partage entre la ressource en eau disponible et les usages du territoire. Accompagner les usages vers plus de sobriété et garantir l’équilibre entre besoins humains et préservation des milieux naturels est un défi majeur pour le territoire.

Un territoire en tension face à l’eau
Le bassin versant de la Drôme est marqué par une influence méditerranéenne : des pluies intenses, suivies de longues périodes sans précipiations. Cette variabilité génère un fonctionnement hydrologique fortement variable, typique des rivières à régime torrentiel.
En été, les besoins en eau pour les activités humaines augmentent fortement – pour l’irrigation, l’alimentation en eau potable, les loisirs, le tourisme – alors que les débits des rivières diminuent naturellement. On parle alors de période de basses eaux. Dans certains secteurs, la rivière peut même s’assécher complètement, un phénomène appelé assec, qui fragilise drastiquement la vie aquatique et limite certains usages.
Ainsi, depuis 1995, il est reconnu que la vallée de la Drôme souffre d’un déficit structurel en eau : la ressource disponible dans cette période de basses eaux (1er juin au 30 septembre) n’est pas suffisante pour couvrir durablement l’ensemble des besoins. Ce déséquilibre n’est pas ponctuel, il est chronique. C’est pourquoi, le territoire met en place depuis plusieurs années un programme d’actions avec un suivi rigoureux et des mesures de gestion et de réduction des prélèvements en eau.
À cette situation s’ajoute le changement climatique. Les projections climatiques annoncent une perturbation majeure du cycle de l’eau et une hausse des températures de +1,7 à +2,4 °C dans les prochaines décennies. Cela pourrait se traduire par des sécheresses plus longues, des sols plus secs, un démarrage plus précoce des assecs.
Des pressions croissantes sur la ressource
Dans ce contexte, pour compenser l’évaporation et la sécheresse des sols, mais aussi suivre l'évolution démographique, les besoins en eau risquent d’augmenter, alors que l’eau sera encore moins disponible. Cela pourrait entraîner de nouvelles restrictions, pour les agriculteurs comme pour les habitants.
En effet, certains usages concentrent l’essentiel des prélèvements, notamment en été :
- L’agriculture est de loin le plus gros consommateur en période estivale avec 65% des volumes prélevés en été destinés à l’irrigation. D’ici 2050, les besoins en eau pourraient augmenter d’au moins 20 à 35 %, du fait de l'augmentation des températures. Pour éviter d'augmenter les prélèvements pour l’irrigation, des efforts de sobriété et de changements de pratiques sont attendus.
- L’eau potable est elle aussi sous pression, notamment dans les zones urbaines et touristiques. La croissance démographique, combinée à l’augmentation des usages de confort (piscines, arrosage, climatisation…), renforce les besoins. L’urbanisation doit désormais intégrer la contrainte de la ressource en eau disponible pour organiser son développement à long terme.
- L’industrie se retrouve également face à une ressource convoitée et limitée. Le développement d’activité industrielle sur le territoire est dépendant de la disponibilité de la ressource en eau.
- Les loisirs, la biodiversité et la qualité paysagère dépendent par ailleurs de cette même ressource, de plus en plus sollicitée et s‘adaptent au fur et à mesure.
Dans ce contexte, l’enjeu n’est pas seulement de préserver la ressource, mais aussi de mieux organiser son usage. L’eau doit être partagée de façon équilibrée entre les différents besoins humains et ceux des milieux naturels. Ce partage ne va pas de soi. Il suppose de faire des choix, d’arbitrer, d’anticiper pour éviter les conflits d’usage. Bref, d’agir collectivement. C’est précisément la mission du SAGE Drôme.
Le SAGE Drôme : un cadre partagé et une gouvernance locale
Pour répondre à ces enjeux, le SAGE Drôme (schéma d’aménagement et de gestion des eaux de la Drôme) fixe un cadre clair pour gérer l’eau sur le bassin versant. Il définit des volumes maximums de prélèvements pour la période de basses eaux par type d’usage en fonction des besoins écologiques de la rivière. Les documents d’urbanisme et de planification territoriale doivent intégrer le cadre du SAGE Drôme.
Il propose également d’accompagner les prélèvements et tous les projets de développement sur la période dite de hautes eaux qui risque également d'être impactée par les effets du changement climatique.
L’objectif du SAGE est de garantir un équilibre durable entre alimentation en eau potable, agriculture, tourisme, économie locale et préservation des écosystèmes. Une trajectoire progressive de réduction des prélèvements a ainsi été définie : -10 % d’ici 2040, puis -20 % d’ici 2050, avec un suivi régulier des effets pour adapter les efforts en continu.
Ce cadre est élaboré et piloté par la Commission Locale de l’Eau (CLE), qui réunit des représentants des collectivités, des services de l’État, des usagers (agriculteurs, industriels, associations) et des citoyens engagés. Ensemble, ils débattent, ajustent et fixent les grandes orientations.
Des solutions concrètes pour agir
Le SAGE Drôme ne se contente pas de fixer des objectifs : il soutient aussi la mise en œuvre de solutions locales et efficaces. Celles-ci s’articulent autour de plusieurs grands axes.
Réduire la consommation (sobriété)
Le SAGE promeut une culture de la sobriété pour tous les usages. Cela passe par des actions comme celles du programme EcoDrôme visant les collectivités, les professionnels et le grand public : installation de kits hydroéconomes, accompagnement des hébergeurs touristiques, chasse aux fuites sur les réseaux des collectivités, ou encore sensibilisation du grand public via des campagnes locales….
Faire évoluer toutes les pratiques (résilience et partage)
Le SAGE encourage un changement des pratiques. Par exemple pour l’agriculture, il vise à accompagner la diversification des cultures, l’adoption de techniques d’irrigation plus efficaces, l’amélioration de la gestion des sols pour retenir l’humidité. Ces adaptations sont nécessaires pour préserver l’eau tout en maintenant une activité agricole viable.
Explorer de nouvelles ressources
Des solutions de stockage ou de substitution sont également étudiées pour sécuriser les besoins essentiels, notamment en période de tension. Dans le secteur de Crest Sud, des études sont en cours pour évaluer le potentiel de sécurisation de l’irrigation de la zone via d’éventuelles retenues alimentées par des eaux de rivière en période hivernale et/ou des eaux usées traitées. Ce type de projet pourrait permettre de réduire la pression sur la ressource naturelle tout en maintenant l’activité agricole.
Des recherches de nouvelles ressources et des projets d’interconnexions sont également en cours pour sécuriser les besoins en eau potable.
Agir ensemble pour préserver l’eau
Face aux effets du changement climatique et à la hausse des besoins, le partage de l’eau devient un défi collectif majeur sur le bassin de la Drôme. Grâce au SAGE, le territoire dispose d’un cadre clair pour anticiper les tensions, organiser les usages, et préserver les milieux aquatiques.
Chacun, à son niveau, doit agir : collectivités, agriculteurs, particuliers, acteurs économiques et touristes. C’est en adoptant des pratiques plus sobres et en s’adaptant dès aujourd’hui que nous pourrons préserver cette ressource vitale pour demain.
???? Rendez-vous le mois prochain pour découvrir le cinquième enjeu de la révision du SAGE Drôme : comment rendre le territoire plus résilient face aux risques liés à l’eau.
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